Maître Julien Curzu, avocat au barreau de Toulon, nous donne son éclairage au lendemain de la décision du Conseil Constitutionnel qui a validité, pour partie, l’extension du Passe sanitaire du projet de loi du 25 juillet 2021.
L’EXTENSION DE L’OBLIGATION DE PRESENTATION DU PASSE SANITAIRE
A/ DEFINITION DU PASSE SANITAIRE
Il s’agit ici d’être en mesure de présenter, dans les hypothèses où cela est rendu obligatoire soit :
- le résultat d’un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la COVID 19, réalisé moins de 48 heures avant l’accès à l’établissement;
- le justificatif d’un schéma vaccinal complet (sauf présentation d’un certificat médical de contre-indication);
- un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination par la COVID 19 réalisé plus de 11 jours et moins de 6 mois auparavant.
La présentation d’un « passe sanitaire » est nécessaire depuis le 9 juin 2021 pour accéder à des rassemblements ou des événements comptant au moins 1 000 personnes
Depuis le 21 juillet 2021 ce seuil a été abaissé à 50 personnes par décret.
La loi élargit le champ d’application de l’obligation de présentation du « passe sanitaire ».
B/ GENERALITES
Il s’agit de pouvoir imposer la présentation d’un « passe sanitaire » :
- aux personnes se déplaçant à destination ou en provenance de la France métropolitaine, de la Corse ou d’une collectivité d’outre-mer, ainsi qu’aux personnels des services de transport concernés ;
- aux personnes se rendant et travaillant dans certains lieux ou établissements recevant du public, notamment :
Restaurants (sauf établissements de restauration collective, de restauration professionnelle routière et ferroviaires, et de vente à emporter de produits préparés), et débits de boissons ;
Lieux de loisirs (cinéma…) ;
Transport public de longue distance dans les transports publics interrégionaux ;
Foires et salons ;
Grands magasins et centres commerciaux au-delà d’un seuil qui sera fixé par décret (et dans des conditions garantissant l’accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi qu’aux moyens de transport) ;
Les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux :
- sauf en cas d’urgence, pour les seules personnes accompagnant ou rendant visite aux personnes accueillies dans ces services et établissements ainsi que pour celles qui y sont accueillies pour des soins programmés ;
- pour le personnel de ces établissements selon des modalités particulières.
Cette réglementation est rendue applicable :
- au public à compter de l’entrée en vigueur de la loi, soit, à compter du 09 août 2021
- à compter du 30 août 2021, aux personnes (salariés principalement..) qui interviennent dans ces lieux, et établissements ;
- selon des modalités particulières pour le personnel exerçant leur profession dans les services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux ;
- aux mineurs de plus de douze ans à compter du 30 septembre 2021.
C/ SANCTIONS GENERALES
Le fait :
- d’accéder à un lieu ou établissement visé ci-dessus sans pouvoir justifier d’un passe sanitaire serait passible de l’amende prévue pour les contraventions de la 4eclasse (135 €) ;
- de ne pas contrôler la détention de ce passe sera également pénalement sanctionné: amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (1 500 € pour une personne physique, 7 500 € pour une personne morale) ou amende forfaitaire : un an d’emprisonnement et 9 000 € d’amende en cas de verbalisation à plus de 3 reprises dans un délai de 30 jours ; possibilité également de fermeture administrative.
D/ L’EXTENSION DU PASSE SANITAIRE DANS LES RELATIONS ENTRE L’EMPLOYEUR ET LES SALARIES
1 – DETAILS DE L’OBLIGATION
- personnel des secteurs d’activités concernés hors services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux : présentation du « passe sanitaire » à partir du 30 août 2021 pour pouvoir accéder à son poste de travail ;
- personnel des services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux :
-
- à partir du 09 août 2021 et jusqu’au 14 septembre 2021 : présentation d’un test de dépistage négatif, d’un certificat de rétablissement (pour leur durée de validité) ou d’un schéma vaccinal complet pour pouvoir accéder à son poste de travail ;
-
- à partir du 15 septembre 2021 : présentation de la justification d’un schéma vaccinal complet (sauf présentation d’un certificat médical de contre-indication ou d’un certificat de rétablissement pour sa durée de validité)
Il s’agit donc ici d’instaurer, pour les personnes travaillant dans les secteurs sanitaires et médico-sociaux, une obligation vaccinale contre la COVID 19, inspirée des actuelles obligations de vaccination contre plusieurs affections (hépatite B, diphtérie, tétanos…).
Sont notamment concernés les personnels :
- les établissements, centres et maisons de santé publics ou privés ;
- des services de santé au travail ;
- les établissements et services médicaux sociaux ;
- des logements collectifs pour personnes âgées ou handicapées ;
- employés à leur domicile par les attributaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), ou de la prestation de compensation du handicap ;
- les associations agréées de sécurité civile ;
- des services de transport sanitaire (ambulanciers…).
Cette obligation de vaccination ne s’applique pas en cas de contre-indication médicale reconnue et pour les personnes n’exécutant qu’une tâche ponctuelle dans les lieux précités.
Par dérogation à compter du 15 septembre et jusqu’au 15 octobre 2021 inclus, les salariés concernés disposeront d’un délai supplémentaire pour achever leur parcours vaccinal. Ils pourront ainsi continuer à exercer leur activité si, engagés dans un schéma vaccinal comprenant plusieurs doses, ils justifient de l’administration d’au moins une des doses requises, sous réserve de présenter le résultat, pour sa durée de validité, d’un test de dépistage négatif.
Les sanctions pénales encourues par la personne exerçant son activité sans pouvoir produire les justificatifs requis et par l’employeur manquant à son obligation de contrôle sont les mêmes que celles prévues ci-avant pour le passe sanitaire.
2 – POSSIBILITE DE SUSPENSION DU CONTRAT DE TRAVAIL
Pour les salariés des établissements recevant du public qui ne pourraient pas présenter de passe sanitaire au 30 août 2021 et ceux travaillant dans les secteurs sanitaires et médico-sociaux à partir du 9 août 2021, qui ne pourraient pas justifier de leur statut vaccinal ou, jusqu’au 15 septembre, d’un test de dépistage négatif, la loi prévoit le droit pour l’employeur de suspendre leur contrat de travail jusqu’à ce qu’ils produisent les justificatifs requis.
Cette suspension s’accompagne de la suspension de la rémunération.
Concrètement, lorsqu’un salarié ne présente pas les justificatifs, certificats ou résultats nécessaires à sa prise de poste :
- il pourra mobiliser, avec l’accord de son employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés ;
- à défaut, l’employeur lui notifiera par tout moyen, le jour même, la suspension de son contrat de travail.
Pour le personnel des secteurs d’activités concernés, hors services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, si cette situation se prolonge pendant une durée de trois jours, l’employeur convoque le salarié à un entretien afin d’examiner avec lui les moyens de régulariser sa situation, notamment les possibilités d’affectation, temporaire le cas échéant, au sein de l’entreprise sur un autre poste non soumis à cette obligation.
La tenue de cet entretien spécifique au bout de trois jours n’est pas prévue pour le personnel des services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux ; l’information doit être donnée par l’employeur dès le début de la suspension du contrat de travail.
Il est à préciser, par ailleurs, qu’afin d’accélérer la couverture vaccinale des salariés, il a été instaurée une autorisation d’absence leur permettant de se faire vacciner sur leur temps de travail.
Ces absences n’entraînent aucune diminution de la rémunération et sont assimilées à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits légaux ou conventionnels acquis par les intéressés au titre de leur ancienneté.
3- SANCTIONS SPECIFIQUES
L’établissement et l’usage d’un faux certificat de statut vaccinal ou d’un faux certificat médical de contre-indication à la vaccination contre la COVID 19 seront punis conformément au chapitre 1er du titre IV du livre IV du code pénal (5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende).
La méconnaissance de l’interdiction d’exercer son activité dans les conditions ci-dessus sera serait passible de l’amende prévue pour les contraventions de la 4e classe (750 € au plus ou amende forfaitaire de 135 €).
La méconnaissance, par l’employeur, de l’obligation de contrôler le respect de l’obligation vaccinale sera également pénalement sanctionné : amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (1 500 € au plus pour une personne physique, 7 500 € au plus pour une personne morale) ou amende forfaitaire ; un an d’emprisonnement et 9 000 € d’amende en cas de verbalisation à plus de 3 reprises dans un délai de 30 jours (jusqu’à 45 000 € pour une personne morale).
Emission enregistré, le 6 août 2021, en partenariat avec l’ordre des avocats inscrit au barreau de Toulon