Congés maladie : rencontre avec Me Stéphanie Royère
Me Stépahnie Royère, présente la nouvelle loi du Code du Travail d’avril 2024, concernant les Congés maladie Cette loi modifie les règles d’acquisition de congés payés durant un arrêt maladie. La loi portant notamment sur la mise en conformité du droit français avec le droit de l’Union européenne (UE) en matière de congés payés, est enfin entrée en vigueur ce 24 avril 2024. INFO83 s’est entretenu avec Me Stéphanie Royère, avocate inscrite à l’ordre des avocats du barreau de Toulon, pour en savoir plus sur l’arrêt maladie et les congés payés.
Une modification des règles d’acquisition des congés payés
Pour rappel, jusqu’ici et sauf dispositions conventionnelles plus favorables, les salariés en arrêt de travail consécutif à un accident du travail (AT) ou à une maladie professionnelle (MP) n’acquéraient de congés payés (CP) que durant la 1ère année d’arrêt de travail ininterrompu. Pour les salariés en arrêt maladie non professionnelle, c’est bien simple, aucun congés payés n’était acquis.
La loi a donc modifié ces règles pour les mettre en conformité avec le droit de l’Union Européenne (UE).
Désormais :
- les salariés en arrêt de travail d’origine professionnelle (AT/MP) acquièrent des congés payés sans limitation de durée. (L.3141-5, 5° modifié).
- les salariés en arrêts maladie d’origine non professionnelle acquièrent des congés payés. Ces arrêts de travail sont considérés comme du temps de travail effectif pour l’acquisition des CP (L.3141-5, 7° ajouté).
En revanche, ces salariés n’acquièrent que 2 jours ouvrables de CP par mois d’arrêt de travail pour maladie non professionnelle, dans la limite d’une attribution, à ce titre, de 24 jours ouvrables par périodes de référence, c’est-à-dire, 4 semaines de CP/an. ( L.3141-5-1).
Une modification des modalités et des délais pour la prise de congés payés
Une obligation d’information à la charge de l’employeur
Depuis le 24 avril 2024, lorsqu’un salarié reprend son travail à la suite d’un arrêt de travail (qu’il soit d’origine professionnelle ou non et quelle que soit sa durée), l’employeur doit, dans le mois suivant cette reprise, l’informer :
- du nombre de jours de congé dont il dispose,
- de la date jusqu’à laquelle ces congés peuvent être pris.
Cette information peut se faire par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine, notamment via le bulletin de paie (L.3141-19-3 nouveau).
L’introduction d’une période de report des congés payés
Pour rappel, jusqu’ici, lorsqu’un salarié s’était trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés annuels au cours de la période prise habituelle en raison d’absences liées à la une maladie ou à un AT/MP, les CP acquis étaient reportés après la date de reprise du travail. La loi ne prévoyait alors aucune limite dans le temps pour écouler ces CP non pris.
C’est désormais chose faite. Sans surprise, le gouvernement a introduit dans le Code du travail une période limite de report des CP non pris. Ainsi, lorsqu’un salarié s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre tout ou partie de ses CP au cours de la période habituelle de prise en raison d’une maladie ou d’un accident, il dispose d’une période de 15 mois pour les utiliser (L.3141-19-1, al.1 nouveau).
A noter qu’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche, peut fixer une période de report plus longue, mais pas plus courte (L.3141-21-1 nouveau).
Quel est le point de départ de ce report ? Attention, c’est ici que les choses se compliquent car la loi pose un principe et une exception
- En principe, le délai de 15 mois court à compter de la date à laquelle le salarié reçoit, après avoir repris le travail, les informations sur ses droits à CP (info qui sont donc transmises dans le mois). Ainsi, tant que le salarié n’a pas reçu cette information, le délai de report ne court pas. Attention, car à défaut d’utiliser ses congés dans ce délai, le salarié devrait les perdre ( L.3141-19-1, al.2 nouveau). Ce point de départ peut donc, en principe, concerner tous les CP acquis par le salarié avant son arrêt de travail (et ce, qu’il les ait acquis sur des périodes de travail ou d’arrêt de travail).
- Une exception est toutefois prévue dans les hypothèses de longue maladie : lorsqu’à la fin de la période d’acquisition des congés, il s’avère que le salarié est en arrêt de travail (d’origine professionnelle ou non) depuis au moins 1 an, la période de report de 15 mois débute dès la fin de cette période d’acquisition (et non au retour du salarié absent) (L.3141-19-2 nouveau). Ce point de départ anticipé de la période de report ne concerne, a priori, que les CP acquis sur cette période.
Deux cas de figure à envisager
- Si le salarié est toujours en arrêt au terme de ces 15 mois : les CP ainsi acquis sont alors définitivement et automatiquement perdus.
- A l’inverse, si le salarié revient dans l’entreprise avant l’expiration du délai de 15 mois, la période de report est alors suspendue, jusqu’à ce que l’employeur l’informe de ses droits à congés (au plus tard dans le mois suivant sa reprise). Une fois le salarié informé, la période de report reprend pour la fraction qui reste à courir.
- LES MODALITES DE CALCUL DE L’INDEMNITE DE CONGÉS PAYÉS SONT ÉGALEMENT RÉTROACTIVES
La loi a également précisé, pour certains salariés, les délais pour réclamer ces congés passés
Les délais pour agir en justice en vue de réclamer des congés acquis entre 2009 et 2024, varient selon que le salarié est, ou non, au 24 avril 2024, toujours lié à son employeur
- Si le salarié est toujours en poste, la loi a fixé un délai : le salarié a 2 ans, à compter de la date d’entrée en vigueur de la loi (soit jusqu’au 23 avril 2026 minuit), pour réclamer en justice les jours de CP (et non une indemnité) dont il a été privés entre 2009 et 2024. Attention ! Au-delà, il ne sera plus possible d’exercer une action visant à récupérer ces CP !
- Si le salarié a quitté son poste, la loi n’a alors rien prévu. Ce sont donc les règles habituelles qui s’appliquent, c’est-à-dire celles prévues par l’article L.3245-1 du Code du travail. Les salariés qui réclament un salaire (ou une indemnité compensatrice de CP) ont donc 3 ans pour agir à compter du jour où ils ont connu ou auraient dû connaître les faits leur permettant d’exercer leur droit. A noter, que contrairement aux salariés en poste, ces salariés ne peuvent réclamer qu’une indemnité compensatrice de CP.
Pour le Gouvernement, qui s’appuie sur l’avis du Conseil d’Etat(8), les salariés qui ont quitté leur entreprise depuis plus de 3 ans à la date d’entrée en vigueur de la loi, ne pourraient plus agir en justice pour obtenir le paiement de leurs CP passés.
☝️ Pour en savoir plus, écoutez les explications exhaustives de Me ROYERE, tout en haut de l’article.
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